Lettre ouverte à Najat Vallaud-Belkacem

A Gex, Rhône-Alpes, le 11 novembre 2015,

Madame la ministre de l’éducation,

Laissez-moi tout d’abord vous dire que je doute que cette dénomination soit correcte dans la mesure où le sens premier du mot « ministre » est « celui qui aide, qui sert », or, vous n’aidez personne. Bien au contraire d’ailleurs, vous desservez. Vous desservez les professeurs de lettres anciennes, les élèves motivés qui ont la volonté de s’instruire, sans parler de la culture elle-même.   

Apprendre le latin, ce n’est pas seulement apprendre une langue morte, mais c’est aussi apprendre à raisonner, déduire, c’est apprendre le goût de la réflexion et du travail, c’est apprendre à porter un regard à la fois critique et ouvert sur l’histoire, c’est reconnaître notre appartenance à un monde qui a été peuplé bien avant nous et qui le sera bien après, c’est s’offrir des perspectives d’avenir. Avez-vous seulement, Madame, pris le temps de mettre les pieds dans une classe de latin où tous les élèves ont choisi d’être présents ? Avez-vous mesuré à sa juste valeur leur motivation ?  Avez-vous vu l’engouement qui se crée alors autour de la langue, de la culture ? Cela m’étonnerait beaucoup. Mais n’est-ce pas là, pourtant, la tâche d’un ministre de l’éducation ? Cependant, il serait peut-être plus grave que vous ayez pris le temps de le faire, parce que cela signifierait alors que vous n’avez que faire de détruire tout cela.

Vous voulez éviter les classes élitistes, avez-vous peur de la connaissance ? Et puis, quelle sera la prochaine étape ? Fermerez-vous les classes européennes, ou, que sais-je, l’ENA ou Science-po, que vous avez vous-même fréquentées ? Il me semble que l’on tombe dans le ridicule.   

C’est attristée pour les générations à venir et pour la culture d’une manière large que je conclus ma lettre.

Dans l’attente d’une éventuelle réponse de votre part,

Léa Narjoud, latiniste

Comments

[Clarine]

Merci beaucoup pour ce magnifique article !

[Coralie]

Bravo pour cette lettre ouverte !



Un petit détail : notre chère ministre a été recalée deux fois au concours d'entrée de l'ENA. Elle n'a donc pas fréquenté cette école.